Le paysage est une suite
Le paysage est une suite (2024 – 2026)
Dates
Information sur l'évènement
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mar29Sep2026sam10Oct2026
Une invitation à la rencontre
Quand Soizic Lebrat propose à Fanny Chiarello de l’accompagner en résidence à l’Abbaye de Noirlac, l’écrivaine pense à l’écriture d’un livret pour le disque à venir. Il s’agirait du parcours de la compositrice, de sa pièce Solo Suite, de l’œuvre de Bach que cette pièce prend pour matière première, à savoir la première Suite pour violoncelle seul ; il y serait aussi question du dispositif d’enregistrement imaginé par Soizic Lebrat et l’ingénieure du son Céline Grangey, peut-être de Noirlac et de son abbaye, plus précisément de l’abbatiale où aurait lieu la captation.
Les choses se passent différemment. Bien que l’on trouve dans son texte ces différents éléments, les obsessions propres à l’autrice s’insinuent dans les pages. Très vite, l’évidence se manifeste qu’il s’agira de poésie. Ainsi, le texte et la musique sont devenus deux œuvres à la fois indépendantes et complémentaires. Tandis que Soizic apprivoise l’acoustique de l’abbatiale, Fanny explore les topographies des environs. De cette double déambulation naît « Le paysage est une suite ». La phrase ouvre le texte et devient également le titre d’un objet parallèle.
Lors des répétitions pour préparer ce que l’on appelle traditionnellement une lecture musicale, dans le but de promouvoir le livre-disque à paraître chez Mazeto Square à l’automne 2024, l’envie d’expérimenter déborde encore une fois. L’idée d’une forme en duo se fait jour. Faire suite, articuler le son et le verbe, inventer une dynamique et un flux qui dépassent la formule classique de la lecture musicale, générer une entité artistique hybride qui les relie aux espaces qui les accueillent.
Une forme de suite en duo
Solo Suite nous semble être une étape dans un dialogue artistique plus vaste.
Nous avons en commun des parcours parfois perçus comme insaisissables, qui reflètent nos désirs et nécessités de création, nos manières d’ouvrir les possibles, mais ce n’est pas tout : nous partageons également la pratique de la course à pied.
Le besoin de mouvement que nous éprouvons dans nos processus créatifs réciproques trouve là, davantage qu’une allégorie, un corollaire. Car dans nos pratiques, la création est incarnée.
Mieux, la course à pied peut y devenir une matière, un médium, voire une méthode. Ce sont des axes de recherche que nous souhaitons explorer.
Nous voudrions interroger notre expérience de la course à pied, les chemins que nous empruntons, voir comment nous existons dans la durée de la course, comment nos façons de courir nourrissent nos paysages intérieurs et comment ceux-ci se traduisent dans nos travaux. Observer l’interpénétration de nos topographies intérieures et de celles que nous traversons.
Fanny :
En avril 2026 paraîtra au Castor Astral mon livre Paysages pauvres, un essai poétique sur le paysage au 21ème siècle. Depuis une dizaine d’années, j’explore, en courant ou à vélo, différents types de paysages. Au fil de ces errances, je consigne des observations de divers ordres – esthétiques, écologiques, urbanistiques, sociologiques et philosophiques. J’ai choisi des cas d’étude très variés pour esquisser une description des grandes villes, des petites villes, des zones périphériques, particulièrement des lotissements et de la ZUP, des espaces interstitiels, des zones frontalières, de la campagne, etc. Il s’agit d’études subjectives, auxquelles je donne une forme poétique plutôt que scientifique ou académique – même si par endroits je joue des lexiques, notamment des codes de l’urbanisme. J’invente ma propre méthode, mes paradigmes de recherche. Toutes ces notes, telles que je les ai agencées, constituent une espèce d’atlas modeste de l’occupation de l’espace et de l’inscription des êtres vivants dans ses diverses dimensions, à notre époque, en Occident.
Il s’agit d’un texte conséquent, à la fois dense et alerte, conçu en mouvement et comme un mouvement. Il m’est apparu comme une évidence que Le paysage est une suite pourrait être une manière, pour moi, de poursuivre le texte hors du livre, de le soumettre à un double mouvement : celui de la lecture à voix haute, mais aussi celui de l’improvisation en duo avec Soizic. Car il est évident qu’un tel recueil ne peut être lu en intégralité. Pendant cette résidence, j’aimerais constituer un échantillon de textes portant sur différents aspects du paysage et improviser un kaléidoscope de lieux dont la couleur s’accorderait avec celles que Soizic donnerait à entendre.
Soizic :
Depuis septembre 2025, je cours avec des micros dans les oreilles. Mon paysage est une suite d’événements sonores captés dans l’instant de la course à pied. Entendre sans l’intention d’écouter.
J’imagine que c’est un monde sonore complexe où les sons intérieurs et les sons extérieurs, proches ou lointains cohabitent dans l’instant, créant une polyphonie chaque fois renouvelée.
Je l’écoute comme un matériau sonore qui raconte tous les chemins de ma pensée, je réécoute encore, j’écoute comment le temps s’écoule quand je cours, rythmé par le souffle et la foulée.
J’écoute comment mon corps s’exprime dans la course à pied.
J’aimerais explorer comment la course à pied peut être aussi une forme de dispositif d’écoute en mouvement à partager avec le public et composer une pièce instrumentale pour violoncelle nourrie de mes paysages de course, que je mettrais en dialogue avec l’improvisation de Fanny.
Production : Ultrasonore
Partenaires (en cours) : Maison de la Poésie, Athénor CNCM